Le vieillissement précoce des bâtiments à Madagascar est un défi majeur, particulièrement dans les quartiers à forte densité où les fissures structurantes apparaissent rapidement. Ces fissures, qui affectent les éléments porteurs comme les fondations et les murs, révèlent un manque de prise en charge professionnelle dès le départ. Les réparations d’urgence, souvent réalisées sans préparation et planification, coûtent entre 30 et 40 % de plus que si un ingénieur avait été impliqué en amont. Dans des zones vulnérables, comme la haute ville, où les inondations et l’instabilité des sols sont récurrentes, l’absence d’expertise technique aggrave encore la situation.

Un exemple exemplaire de contrôle rigoureux est Tokyo, où les normes de construction sont strictes, en particulier face aux risques sismiques. La loi oblige les propriétaires à assurer non seulement la sécurité mais aussi la durabilité à long terme des bâtiments. À l’inverse, dans des villes comme Naples, la paupérisation des propriétaires conduit à des pratiques superficielles. Incapables de financer des rénovations profondes, ces propriétaires adoptent des solutions temporaires comme la peinture ou l’enduisage, laissant les fissures structurantes et les fondations fragiles en suspens. Ces pratiques créent un cercle vicieux où la dégradation du patrimoine s’accélère, entraînant la précarité des occupants et compromettant la sécurité.

Ces cache-misères, largement répandus sous la forme de petatoko (enti-milaza zavatra natao antemaka, tsy dia mafy rafitra fa kongorevo, vita tsizarizary), illustrent bien cette dynamique. L’application d’enduits, l’ajout de panneaux d’alucobond, ou encore le bardage en bois ou en PVC donnent l’illusion d’une modernité, mais ne traitent jamais les causes profondes des détériorations. À long terme, ces pratiques temporaires laissent place à des coûts explosifs, car les problèmes structurels finissent par refaire surface.

Le façadisme, tout comme le ravalement de façade, renforce cette logique d’apparence trompeuse. Si la façade reste intacte, le patrimoine architectural semble préservé, mais à quel prix ? La substance même des bâtiments, leur intégrité historique, est souvent effacée. Cette obsession pour l’apparence se reflète aussi dans l’usage des murs-rideaux et des panneaux d’alucobond, symboles de modernité, mais peu adaptés aux réalités locales.

Parmi les solutions utilisées dans ces rénovations superficielles, l’enduit bâtard se distingue par sa polyvalence. Il s’agit d’un mélange de chaux et de ciment, combinant la souplesse et la perméabilité de la chaux avec la solidité du ciment. Il permet aux murs de respirer tout en offrant une bonne résistance aux intempéries. Utilisé pour des applications aussi bien intérieures qu’extérieures, cet enduit est idéal pour les supports en brique, pierre ou béton, car il prévient les fissures tout en protégeant efficacement les surfaces. Cependant, il présente des inconvénients : son manque de flexibilité peut entraîner des fissures sur des supports sujets aux mouvements, sa perméabilité réduite peut retenir l’humidité dans les murs, et son impact environnemental est plus élevé en raison de l’utilisation du ciment. De plus, les réparations peuvent être plus complexes que sur un enduit à la chaux pure.

Pour contrer ces dérives, il est essentiel d’adopter des procédés durables. Commencer par des solutions simples comme un jointoiement de qualité peut protéger l’enveloppe des constructions en brique ou parpaings. L’ajout d’un enduit imperméable ou d’un traitement hydrofuge permet de renforcer la résistance à l’eau, tandis que le recours au bardage ou à des débords de toit plus coûteux assure une protection à long terme.

Face à ces défis, la formation en génie civil, axée sur la réhabilitation et la rénovation, devient primordiale dans des pays en développement. En intégrant les principes de l’économie circulaire et des procédés frugaux, cette approche permet de maximiser l’utilisation des matériaux existants tout en réduisant les coûts. Les ingénieurs formés à ces techniques peuvent ainsi proposer des projets résilients, respectant les contraintes économiques locales tout en minimisant l’empreinte écologique.

En s’inspirant d’initiatives comme celle de Jimson Heritsialonina à Fianarantsoa, où la mobilisation de la communauté autour de la préservation des trano gasy a permis de revitaliser des maisons traditionnelles, nous pouvons imaginer des solutions similaires pour Antananarivo. Des politiques fiscales comme celles de Kyoto et La Réunion, où des subventions soutiennent la préservation des bâtiments historiques, pourraient offrir un cadre propice pour la réhabilitation durable des trano gasy, tout en valorisant l’identité culturelle et en créant des opportunités économiques à travers l’artisanat et le tourisme. (Lien vers le post ici : https://www.facebook.com/share/p/jBqXYjFPai7Rib41/)

Vidéo : en 2020 j’ai pris l’initiative personnelle de m’éduquer et sensibiliser les équipes de TRANO Architecture aux techniques traditionnelles. Des amis architectes qui se reconnaîtront ont pistonné cet artisan très consciencieux de son travail admirable qui est toujours bien solide présent sur le mur de clôture de notre bureau de Mahamasina.

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