Tout au long de ma carrière, j’ai toujours été très transparente et pragmatique dans l’évocation de mes stratégies de gestion. J’ai choisi d’aborder ces défis avec clarté et sincérité, en espérant que cette transparence soit accueillie avec bienveillance. Il est essentiel, dans notre secteur, de partager nos idées et nos expériences pour évoluer ensemble. Je m’adresse aussi à ces jeunes diplômés aux portes de l’Ordre pour les conforter dans leur choix d’être rentrés et confirmer qu’il y a un avenir pour notre profession dans ce pays, pour peu que l’on entretienne entre nous des relations de compassion et d’entraide.

“Pourquoi tu ne continues pas de travailler avec ton collègue C. du Canada et faire ses projets depuis Madagascar ?” Cette question revenait souvent dans mes premières années. “Il est où le Canadien pour qui vous travaillez en vrai ?” m’avait demandé d’entrée ce très grand patron.

Ces interrogations m’ont toujours poussée à réfléchir à la trajectoire que je voulais emprunter. Il y a 7 ans, un grand bureau d’études régional m’a proposé de diriger leur filiale à Madagascar. Le modèle, basé sur l’intégration dans un réseau international (et surtout gagner un salaire stable), semblait attrayant. Pourtant, j’ai pris la décision de refuser, persuadée qu’en avançant seule, je pourrais créer un impact plus authentique et en phase avec notre réalité locale. Avec le recul, et après avoir consolidé un portfolio de projets réussis, un carnet d’adresses bien étoffé et une réputation solide, je réévalue aujourd’hui ces options encore sur table maintenant que j’ai le “hazon-damosina” plus épais pour supporter les chocs et risques.

Dans la quête de croissance, différentes options s’offrent aux architectes malgaches. L’une des plus populaires est l’outsourcing, qui consiste à fournir des services techniques comme la modélisation 3D, les dessins techniques, ou la gestion de documents BIM pour des entreprises étrangères. Cette solution permet aux firmes internationales de réduire leurs coûts tout en s’appuyant sur les talents locaux. Cependant, malgré ses avantages financiers, l’outsourcing pose des limites claires. Il est souvent réduit à l’exécution technique, laissant peu de place à l’innovation créative ou à la prise de décision stratégique. En cela, il confine parfois les architectes locaux à des rôles de techniciens, sans réelle valorisation de leur savoir-faire.

Par ailleurs, d’autres alternatives, comme les partenariats internationaux, méritent d’être explorées. Ces collaborations peuvent offrir une plus grande flexibilité et permettre une implication plus importante dans la conception. Selon le type de partenariat choisi, que ce soit une collaboration technique ou une co-conception, ces accords permettent aux firmes locales de renforcer leur présence sur les marchés internationaux. Mais il faut rester vigilant pour éviter que la firme malgache ne soit perçue comme une simple extension technique, privée de son autonomie créative.

Cependant, ces partenariats, tout comme l’outsourcing, doivent être abordés avec prudence. La déontologie et l’intégrité doivent toujours être au cœur de nos pratiques. Dans ce contexte, il est malheureusement fréquent que certains partenariats internationaux exigent des signatures de complaisance, une pratique où un architecte local est invité à apposer son nom sur des projets auxquels il a peu ou pas contribué. Ce type de comportement, qui peut s’apparenter à une forme de corruption, menace non seulement la réputation de la profession, mais aussi la sécurité des projets eux-mêmes. Préserver notre probité dans un environnement où la préservation de notre éthique est une bataille constante, mais cruciale pour assurer la pérennité et la crédibilité de notre métier.

En réponse à ces défis, j’ai choisi depuis 5 ans de me tourner vers la consultance par prestation intellectuelle, une voie qui me permet de valoriser pleinement mon expertise tout en gardant le contrôle sur la qualité des services que je propose. Ce modèle, qui ne nécessite que peu d’investissement financier, m’offre une flexibilité optimale, me permettant de me concentrer sur des projets à forte valeur ajoutée. La consultance intellectuelle permet de préserver notre autonomie professionnelle, tout en restant fidèle à nos principes éthiques et en évitant les dérives et amalgames locales entre statut d’ingénieur et d’architecte.

de guerre lasse…

Comment pouvons-nous continuer à développer notre positionnement tout en préservant notre indépendance et notre vision architecturale ? Comment concilier compétitivité internationale et impact local durable, tout en restant fidèles à nos valeurs et en préservant notre savoir-faire ? Comment balancer les comptes dans une économie où les crédits et garanties sont presque inexistants, où les difficultés de recouvrement sont fréquentes, et où le barème des prestations n’est même pas légiféré, même dans les marchés publics ? Comment pratiquer dignement l’Architecture dans son pays au lieu d’aller à l’étranger surtout si les salaires locaux pour malgaches oscillent souvent entre 400 et 1 000 USD par mois, tandis que les cadres expatriés peuvent toucher entre 3 000 et 5 000 USD, avec des avantages supplémentaires ?

photo d’il y a 18 ans et tellement d’aventures depuis cette version de moi-même mais comme les variantes listées dans ce post j’aurais pu illustrer avec des photos de “Jogany dans le Bongolava” ou “Jogany dans le Jet privé” nefa lasa tsy hita loatra hoe hotrany efa tafatafa zany malgré tout

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