Dans les petites masures malgaches, ces trano bongo qu’on aime trop bien idéaliser – car bien sûr, le mythe du bourgeois gentilhomme ou du rat des villes qui a quitté la campagne reste tellement bien vivace dans nos pratiques – soyons vraiment honnêtes : ces cases sont tellement inconfortables et abritent les pires vulnérabilités. Déjà, elles sont très mal aménagées, et on n’a pas vraiment fait grand-chose, ke dal, pour améliorer la situation. L’ancienne Loi sur l’Urbanisme et l’Habitat contenait des sections sur l’habitat rural, quelque chose de choquant sans doute pour ceux qui ont mis à jour ce texte, car elles ont bel et bien disparu comme ça.

Les efforts les plus valeureux que j’ai vu expérimenter et qui ont donné résultat viennent d’entités œuvrant dans l’humanitaire. La première, que je n’arrive toujours pas à identifier, est intervenue auprès de villages sur la RN7 et a subventionné des petites cheminées (plutôt tubes en inox) pour évacuer la fumée de cuisson de la maison. J’ai bien noté lorsque mon oncle avait mentionné que l’une des causes de la tuberculose chez les enfants malgaches venait de nos fomba de tout laisser cuire et fumer à l’intérieur. J’en ai lu des kilomètres sur les bienfaits cosmogoniques du avarampantana et suis tellement reconnaissante pour ce constat très scientifique des méfaits des émanations sur les enfants.

Je le répète et j’assume : l’habitat malgache, à l’état tel qu’il est, bien médiéval, ne représente rien de bénéfique pour ses occupants hormis la protection et l’abri. Zay. On saisit mal encore ce qui rend les touristes urbains à s’instagrammer ces intérieurs qui démangent de pucerons, où dorment à même la terre sur un simple tsihy ou un matelas en paille toute la famille repue d’une très longue journée aux champs. Je ne m’étendrai pas sur la situation sociale et ce qui maintient un paysan malgache dans la précarité, d’ailleurs je ferme cette digression pour présenter le deuxième cas.

L’IFRC et la Croix-Rouge Madagascar font un travail extraordinaire en démontrant que c’est dans le processus de compréhension, d’innovation concertée, de co-design et surtout de transmission que le bâti traditionnel peut être amélioré dans sa résistance aux cyclones. Déjà, il ne faut pas du tout entendre qu’une case paracyclonique ait quelconque vocation à préserver les vies de ceux qui l’abritent. Il s’agit d’un process accompagné de systèmes d’alertes efficaces qui sensibilisent les communautés à courir aux abris destinés à cet usage (imaginez le film Tornado ou quelconque Godzilla), et par la suite de limiter les dégâts sur la construction existante. Là, on parle des solutions portées dans les techniques d’assemblages et dimensionnement des éléments structuraux et couvertures, mais qu’en est-il du confort ?

Tenez l’usage de l’enduit, ou même enduit gasy qui offre à la fois des avantages pratiques, esthétiques et écologiques. L’enduit joue un rôle clé dans la régulation thermique, maintenant les intérieurs frais en période de chaleur et réduisant les pertes de chaleur en saison froide. Sur le plan esthétique, il permet de lisser les surfaces, de corriger les irrégularités et d’apporter une finition qui peut être adaptée à des préférences locales ou contemporaines. Mais la chaux ou le ciment pour améliorer sa durabilité coûte cher et certains maçons dans l’économie bah voilà ils rationnalisent et l’enveloppe tient moins bien.

J’avais lu une minute de réunion du conseil municipal datant des années 50 où on débattait sur la résistance au changement dans l’introduction aux sols sous forme de chape lissée cimentée ou même mosaïquée type carrelage. D’origine, le sol des trano bongo – et je soupçonne aussi les trano gasy proto-véranda anglaise – avait des sols battus. Sans aucun doute, il y aurait eu de très bonnes techniques pour éviter les eaux et les bestioles dans les rova et maisons de lapa, mais le commun des mortels ne se voyait pas vraiment un statut où on améliorait leur quotidien. Fomba tsy hita ê… Combien même j’apprécie l’opinion de beaucoup dans l’idée de toujours préserver les coutumes, quand celles-ci sont dépassées, on a eu l’habitude de choisir la solution ailleurs. Yup. Vous aviez des charpentiers créoles, des missionnaires anglais, des Jean Laborde… Comme en 2024, où on continue à puiser dans le meilleur des talents des Mascareignes et d’ailleurs, les Ntaolo étaient efficaces pour améliorer le confort des riches et puissants. Mais quand on observe vraiment la case Zafimaniry, combien même elle est belle et mystique, la nouvelle génération a préféré la tôle bien importée et bien bleue. Parce que ça protège mieux de la pluie, parce que les matériaux pour construire de meilleurs toits comme avant s’épuisent, et parce que, des fois aussi, on ne sait plus trop comment faire.

Je suis certaine que l’innovation dans les traditions techniques existe, et le Malgache reste cet artisan bourré de ressources et d’intelligence. Mais lorsqu’il s’agit de l’habitat, on s’admire à prôner “résilience”, “mihafy”, “miharitra”… pour encenser par la suite les promoteurs des solutions temporaires, plus chères et pas du tout durables, où on ne gagne rien, rien de rien, en acquis et connaissances, même pas en confort.

je conclus avec un paragraphe bien raide sorti de l’IA sur l’habitat décent, tel que défini par l’Objectif de Développement Durable (ODD) 11 des Nations Unies, doit garantir la sécurité physique face aux aléas, offrir des conditions de salubrité avec accès à l’eau potable et à un assainissement fonctionnel, et proposer des espaces adaptés aux besoins quotidiens. Il doit également assurer un confort thermique, être économiquement accessible, durable, culturellement adapté, et inclusif pour les personnes vulnérables. Enfin, la sécurité juridique, notamment contre les expulsions arbitraires, et la proximité des services essentiels complètent ces critères, alignés avec la vision de l’ODD 11 : « rendre les villes et les établissements humains inclusifs, sûrs, résilients et durables ».

caption de la photo dans une série envoyée par Noely Ratsimiebo : “Architecture du sud, pour ta bibole, résilience absolue, O impact carbone”

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