
La Journée Internationale de l’Architecture a lieu tous les 1er Lundis d’Octobre. Elle se célèbre dans chaque pays comme une partition de musique accordée par l’UIA. Les évènements de Maison de l’Architecture Malagasy qui ont débuté en 2019 sont toujours d’une originalité et pertinence qui marquent les esprits.
La 1ère édition tenue à l’Akademia Malagasy a été un évènement d’anthologie qui a marqué ma carrière d’une trace indélébile. Nous y avons invité les plus grandes spécialistes du pays sur les Akora, soit les matériaux, de construction. Nous avons échangé pendant des heures sur l’urgence de valoriser leur chaîne de valeur et de diriger tant la R&D que l’industrie que le secteur de construction vers des perspectives plus inclusives et durables pour la société et environnement malgache. Pour le Bambou, nous avons eu la très pertinente présentation de mon ami Njaka Rajaonarison toujours au taket (big up!), le Bois bien sûr a été magistralement mis en valeur par Tahiana Ramananantoandro qui ne s’arrête jamais, le ciment bien sûr par l’entité leader Holcim et la terre…ah ….la terre…le matériau au centre de l’architecture malgache a bien sûr été introduite par un architecte malagasy Martial Rajaonarivelo. J’ai posté ici une courte vidéo du début de son speech mais son intervention aura été de celle qui créé des vocations et réveille des passions. La conclusion de cette Journée a été très académiquement synthétisée par le Pr Ranjeva sur la nécessité de faire un plaidoyer pour une Politique du Matériau à Madagascar.
Fast forward 2024, j’ai construit mes bâtiments en terre. j’ai lutté pour que les maîtres d’ouvrage investissent dans le matériau. j’ai opté pour la brique de terre compressée (BTC) car c’était le chemin le plus court pour créer une ouverture pour les autres akora encore à propager en mode croisade. Le Bambou dans lequel je berce depuis le 9è World Bambou Congress d’Antwerpen en Belgique en 2012 où j’ai eu le plus high level #yabufé avec les experts les plus en vue dans ce matériau. Le Bois que j’ai enseigné 4 ans pour réveiller les futurs ingénieurs dans la conception architecturales contemporaine ancrée dans les traditions ancestrale du détail à la structure. Mais la Terre sera toujours le matériau le plus facile à utiliser à Madagascar. Grâce au génialissisme Pr Guy Joel RobisonarisonJoel Robisonarion du CNRIT, nous avons été sensibilisé par la R&D dans ce matériau.
Les différents ateliers pour sa mise en valeur m’ont toujours convaincue qu’il y a un énooooorme potentiel encore à creuser. On ne s’arrêtera donc pas à la conversation sur le patrimoine du Tamboho gasy ou aux challenges du pisé. L’étape décisive dans la mise en valeur de la terre comme matériau a été lors des travaux pour la création de la Norme de la brique de terre compressée (BTC) avec le Bureau des Normes de Madagascar toujours chapeauté par le très actif M Séraphin Razafimahafaly. Ces travaux où on participé tous les acteurs du secteur dont la LNTPB, les entreprises fournisseurs, les ministères et les chercheurs sont restés au point mort depuis 2020 malheureusement par l’absence d’un soutien institutionnel nécessaire pour la sortie d’un décret ministériel.
Je préfère donc à mon niveau continuer ce qu’il doit se faire et espérer que quelque part ces efforts d’une très grande communauté soient relayés. Voici donc la petite histoire de la brique de terre compressée (BTC) à Madagascar.
L’introduction de la brique de terre compressée (BTC) à Madagascar a été tentée dès les années 1980 avec le soutien de l’ONUDI, mais cette première initiative n’a jamais réussi à s’implanter dans les pratiques de construction. Malgré son potentiel évident – à la fois écologique et économique – la BTC a échoué à se faire une place, entravée par un manque de normes officielles, une méfiance culturelle envers les nouvelles technologies, un soutien institutionnel insuffisant, et des défis logistiques non surmontés. Ces obstacles, bien que décisifs à l’époque, n’ont fait que retarder une opportunité. Aujourd’hui, les conditions sont plus propices pour relancer ce matériau et en exploiter pleinement les nombreux avantages.
La BTC n’aurait jamais atteint le succès qu’elle connaît ailleurs sans l’innovation du CINVA-RAM, cette machine simple mais révolutionnaire développée en 1952. Une presse manuelle, robuste, qui permet de compacter la terre stabilisée pour en faire des briques solides et uniformes. Accessible à presque toutes les communautés rurales grâce à son faible coût et son entretien minimal, le CINVA-RAM permet de produire les briques directement sur le site du chantier. Résultat : une réduction des coûts logistiques et la création d’emplois locaux. En formant les artisans à l’utilisation de cette machine, on développe des compétences locales tout en répondant aux besoins croissants de la construction durable.
Mais l’un des véritables atouts de la BTC réside dans ses économies significatives. Contrairement aux matériaux classiques, la BTC peut être posée à sec, sans mortier, grâce à sa précision dimensionnelle. Le mortier, souvent un coût caché dans un projet de construction (jusqu’à 15 % des matériaux), est tout simplement éliminé. De plus, la BTC, avec ses qualités esthétiques naturelles et sa surface régulière, n’a pas besoin d’enduit de ciment, ce qui permet encore de réduire les coûts d’environ 10 %. On parle ici d’une économie totale pouvant atteindre 25 % sur les coûts de construction. Inutile de dire qu’un tel chiffre fait la différence, surtout dans un contexte où chaque franc compte.
Cependant, pour que la BTC puisse vraiment jouer son rôle dans la construction d’un Madagascar plus durable, il est indispensable de la normaliser. Actuellement, l’absence de normes officielles freine encore son adoption à grande échelle, car sans garanties claires sur la qualité et la durabilité, les promoteurs et les financiers restent réticents. La normalisation de la BTC lui donnerait cette crédibilité nécessaire, ouvrant ainsi les portes des grands projets et des financements, tout en validant le vita gasy.
Plusieurs pays africains, comme le Burkina Faso, le Ghana ou le Mali, ont déjà saisi cette opportunité et ont instauré des normes spécifiques pour la BTC, permettant à ce matériau de s’imposer dans leurs secteurs de la construction. Madagascar se doit de suivre cet exemple. En normalisant la BTC, nous renforçons non seulement notre secteur du bâtiment, mais nous valorisons aussi nos ressources locales et notre savoir-faire. Nous prouvons que le vita gasy peut relever les défis contemporains, en proposant des solutions à la fois durables, économiques et respectueuses de l’environnement.
Dans les pays où la brique de terre compressée (BTC) est normalisée et où le CINVA-RAM est utilisé, plusieurs éléments sont mis en place pour garantir que les BTC produites répondent aux normes locales. Ces pays ont développé des approches méthodiques qui incluent la formation de la main-d’œuvre, la mise en place de processus de contrôle qualité et le respect de critères techniques spécifiques. Voici comment ils procèdent :
Formation de la main-d’œuvre dans un pays où l’informel règne
* Programmes de formation technique : Les gouvernements, ONG, ou organismes de développement organisent des programmes de formation pour les artisans et les techniciens. Ces formations couvrent non seulement l’utilisation du CINVA-RAM, mais aussi toutes les étapes cruciales de la production de BTC. Les travailleurs sont formés à sélectionner la terre adéquate, à la stabiliser correctement (souvent avec du ciment ou de la chaux), à ajuster la pression du compactage, et à assurer un bon séchage des briques. Cette formation garantit que les travailleurs sont capables de suivre les bonnes pratiques pour produire des BTC conformes aux normes.
* Formation continue : Dans certains pays, la formation n’est pas ponctuelle, mais continue. Des centres de formation technique peuvent offrir des ateliers réguliers pour perfectionner les compétences des artisans. Cela permet d’assurer que la qualité des BTC reste constante et conforme aux normes en vigueur.
Suivi et contrôle qualité “l’entre-deux”
* Laboratoires locaux : Dans les pays où la BTC est normalisée, des laboratoires ou centres techniques effectuent des tests réguliers pour vérifier la qualité des briques produites. Ces laboratoires testent la résistance mécanique, la durabilité, l’absorption d’eau, et d’autres propriétés pour s’assurer que les BTC respectent les normes locales. Les artisans et les producteurs de BTC envoient des échantillons aux laboratoires pour validation.
* Contrôles sur site : Les équipes de contrôle peuvent également effectuer des visites sur les sites de production pour s’assurer que le processus de fabrication est conforme aux standards techniques. Elles vérifient l’état des presses comme le CINVA-RAM, la qualité de la matière première, et le respect des méthodes de stabilisation et de compactage.
Processus standardisé de production pour développer de manière exponentielle
* Choix de la terre : La qualité de la terre utilisée pour la fabrication des BTC est primordiale. Les pays où la BTC est normalisée ont défini des critères précis pour le type de terre pouvant être utilisée. La formation inclut la capacité à identifier et à traiter la terre pour qu’elle soit compatible avec les standards de production.
* Stabilisation de la terre : Dans les formations, une grande attention est portée à la proportion de stabilisants (comme la chaux ou le ciment) à mélanger avec la terre. Cela est essentiel pour garantir la solidité et la durabilité des BTC produites.
* Utilisation correcte du CINVA-RAM : L’efficacité du CINVA-RAM dépend du respect des paramètres de pression lors du compactage. Les formations techniques enseignent comment ajuster la pression pour obtenir des briques uniformes et solides. L’entretien régulier de la machine est également abordé, car une presse mal calibrée pourrait produire des briques de qualité inférieure.
Normes locales et certification pour quitter le point mort
* Développement de normes nationales : Dans des pays comme le Burkina Faso, le Ghana ou le Mali, des normes nationales pour la BTC ont été établies. Ces normes précisent les caractéristiques que les briques doivent respecter (résistance, taille, absorption d’eau, etc.). Les autorités locales délivrent des certifications aux producteurs qui respectent ces normes, créant un cadre fiable pour l’industrie de la BTC.
* Label de certification : Une fois les BTC produites et testées, certains pays attribuent un label ou une certification de conformité aux normes. Cela facilite la commercialisation des BTC et rassure les investisseurs et promoteurs de projets de construction.
Sensibilisation et incitations car ce pays a besoin d’un matériau local, abordable, durable et disponible pour se moderniser
* Sensibilisation du marché : Dans certains pays, les gouvernements et ONG sensibilisent les promoteurs immobiliers, les entreprises de construction, et les collectivités sur les avantages de la BTC normalisée. Ils promeuvent l’utilisation de ce matériau pour les projets de construction publics ou privés, comme les logements sociaux.
* Incitations financières et réglementaires : Pour encourager l’utilisation de BTC normalisée, certains gouvernements offrent des incitations financières ou fiscales aux promoteurs qui adoptent cette technologie. De plus, des réglementations locales peuvent exiger que certains projets incluent une proportion de matériaux locaux et durables comme la BTC.
Les pays ayant normalisé la BTC, tout en utilisant des presses comme le CINVA-RAM, mettent en place une approche complète qui inclut la formation technique de la main-d’œuvre, des processus rigoureux de contrôle qualité, et l’établissement de normes nationales claires. La formation des artisans et techniciens est essentielle pour garantir que la BTC produite respecte les standards, tout comme l’existence d’infrastructures de contrôle et de certification pour assurer une qualité constante. Ces éléments sont essentiels pour que la BTC soit considérée comme un matériau fiable et compétitif dans les secteurs de la construction.