22 m² de coffrage en bois, à environ 30 000 ariary le m², ont été nécessaires pour ce projet de 600 m2 SHOB. Au pied de cette immense pile de “chandelles” pour soutenir les coffrages, on voit encore un morceau de panneau bakélisé qui avait servi à coffrer la dalle et les éléments structuraux en béton armé, mais cela n’a pas empêché le gaspillage. Il faudrait d’ailleurs que je rappelle au client que ces matériaux lui appartiennent maintenant que le chantier est terminé. Peut-être qu’en récupérant un peu, il pourra alléger sa culpabilité en s’engageant dans l’économie circulaire (je ne vous parle pas de notre mini-guérilla autour de l’utilisation de l’eau). Après tout, des hectares de forêts de conifères savamment gérées dépendent du secteur de la construction, et comme on dit, quand le bâtiment va, tout va, n’est-ce pas ?

On cherche à moderniser nos villes en construisant de grands édifices et en multipliant les équipements de taille moyenne. Le logement collectif est encore à ses débuts (depuis 50 ans, tout de même) mais avec la rationalisation foncière et, espérons-le, le boom imminent des classes moyennes, cela finira bien par exploser. Si on ne se détache pas bientôt du tout-béton, il reste des problèmes sous-jacents avec des conséquences parfois pires que l’usage abusif de ce matériau. Bien sûr, vous me direz, tout le circuit bien rodé de la brique en terre cuite (extrêmement gourmande en bois), des producteurs d’étais et de planches de pin, sans oublier l’approvisionnement en sable de rivière et en gravier, fait vivre des centaines de milliers de familles à travers l’île, mais à quel prix ?

Madagascar n’est certes pas un grand émetteur de carbone, et d’ailleurs on s’appuie sur ce statut pour mettre en hypothèque nos terres et apaiser la conscience des autres via les schémas financiers vertueux du REDD+. Mais sommes-nous vraiment aussi naïfs et peu innovants pour toujours suivre ces “lalana masaka” (sentiers tout tracés) ces trajectoires bien tracées vers un pseudo-développement, sans réfléchir à leurs véritables coûts environnementaux et sociaux ?

Plutôt que de sacrifier nos précieuses ressources naturelles pour gratter quelques ariary ici et là, il est temps d’adopter une approche plus créative et durable. Au lieu de simplement imiter les modèles de développement imposés de l’extérieur, pourquoi ne pas réinventer nos propres solutions, en tenant compte des besoins de nos communautés et de la préservation de notre environnement déjà si fragile ? Le Bambou pousse bien et très vite, on déplore l’impossibilité de regénérer la filière bois alors que des hectares sont dédiés à ce pin-à-jeter, et j’en passe et des meilleurs.

Il est crucial de comprendre que le véritable développement ne consiste pas seulement à suivre des modèles préétablis, mais à innover, à s’adapter à notre propre réalité, et surtout, à construire un avenir durable qui bénéficie à la majorité, sans continuer à piller nos écosystèmes déjà affaiblis.

*je prépare une série d’articles pour nourrir le contenu d’une nouvelle mission qu’on m’a confiée et qui va me replonger dans le monde de l’enseignement. stay tuned.

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