Mes cousins proches viennent de perdre leur grand-mère et je voulais reposter cette photo de notre rue pour célébrer nos grands-mères centenaires qui ont vécu presque toute leur vie au coeur d’Antananarivo.

La rue Colbert, que j’ai connue comme étant la Rue Paul Dussac du nom du colon communiste qui a préparé les malgaches vers l’Indépendance avec Jean Ralaimongo dans les années 30 et devenu récemment la rue Razanatseheno, du 1er Président de la Chambre de Commerce, qui se trouve juste un peu plus haut.

pour les Millenials ce sera la rue “où se trouve la Ribaudière”. car la gentrification des 10 dernières années dans notre si belle rue a fait oublier que les quelques belles maisons préservées par les familles ont abrité des coordonniers, des marchands, des docteurs…toute une classe sociale, des petites abeilles travailleuses qui auront marqué nos vies, la mienne en tout cas et tracé dans nos mémoires des modèles exemplaires que l’on peut justement qualifier de “raianmandreny”1,2 non pas uniquement par leur âge centenaire mais dans la façon dont elles se sont comportées.

ici n’est pas la place pour porter un jugement sur ce qui fait “raianmandreny”, les choix, les comportements, appartenance politique ou autres légers salameks du genre “ce que tu as dit en 2017 je l’ai retenu et ça comptera pas même si tu t’ai excusé je m’en fous pour moi le mal est fait tu vaux pas grand chose tu viendras pas à ma Boum ce soir”. mais comme nous aimons bien cela dans la société malgache de 2021, nous pourrions placer nos grands-mères de la Rue Paul Dussac dans la meilleure des générations. Celle qui à force d’abnégation et de compassion, fera toujours passer le bien-être d’autrui avant le sien. Celle qui travaillera à la lueur de la bougie tard le soir au prix de sa vue pour honorer la livraison de demain très tôt le matin. Celle qui s’est sacrifiée pour le bien-commun. celle qui a vu les espoirs et les déceptions de toute une nation et qui s’est toujours relevée.

Le covid-19 nous a appris l’urgence et la préservation. tentons aussi le respect de la communauté ainsi que le goût pour l’effort et le travail. pas celui qu’on exhibe tous les 4 matins sur les réseaux sociaux mais celui qui nous fait suer et porte fruits à tous les coups juste parce que la cause en vaut la peine. 

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1 Je fais une petite digression ici pour citer l’excellent ouvrage de Aina Razafiarison “Concept weberien “éthique protestant-capialisme” et contexte de pauvreté : le cas malgache. Intégration épistémiologique de la pensée complece dans une approche par l’histoire de la pensée et l’institutionnalisme économique, qui m’a pris 6 mois à terminer tellement il est tellement, sur l’accession au statut de  “raianmandreny”

(…) Nous avons pu constater maintes fois que cette volonté oppressante de se valoriser au sein de de sa communauté et d’asseoir son prestige communautaire pour valdier la consécration de la “réussite”.

(…) Aux yeux de l’homo malagasi, toutes les voies pour acquérir ce statut de “raianmandreny” ont les mêmes valeurs : l’enrichissement (du moins dans l’apparence et peu importe son origine), la généalogie, le poste politique, les responsabilités religieuses telles que les professions cléricales (pasteurs, catéchistes), ou les responsabilités dans les assemblées de l’église (diacres, …). L’enrichissement ou la détention du capital n’est ainsi qu’un facteur parmi les autres dans les voies d’accession vers le statut de notable “raianmandreny” .

2 Je voudrais aussi rappeler ici l’époustouflant ouvrage de l’anthropologue David Graeber, un des meilleurs de sa génération qui a eu aussi une carrière d’anarchiste et d’analyste politique (le slogan “We are the 99%“c’est lui) décédé en 2020 et qui a passé quelques années à Madagascar dans la région d’Arivonimamo dans les années 90 pour rédiger l’ouvrage “Lost People: Magic and the Legacy of Slavery in Madagascar” où je le cite 

(…) Knowledge alone cannot make one a true Ray amandReny. One myst be an elderly head of a large local family – or even better, a recently deceased one. (…) The most obvious of these was a knowledge of the past, of ancestral custom and oral history (lovan-tsofina) which elders were always assumed to have. But there were certain skills that were considered rhetoric (mikabary), which drew on ancestral, proverbial wisdom. 

(…) Oratory and astrology were considered essentially male forms of knowledge, though some women had them; there were also skills seen as essentially femal which did add to prestige of older women in parallael way, such as midwifery (fampivelonana), and knowledge of herbs for common ailments, which mothers often passed on to their daughters.

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