C’est un euphémisme que de dire que cette semaine a été l’une des plus difficiles depuis que je suis rentrée au pays. Si j’avais déjà envisagé que les difficultés liées à la pandémie de Covid-19 s’atténueraient d’ici la fin de 2023, car je suis une pragmatique convaincue, la dernière ligne droite est vraiment difficile à supporter. L’objectif était de tenir bon assez longtemps pour survivre au jour le jour, simplement ne pas abandonner.

Nous leur enseignerons également que manger du mangidy après le sucré ne se résume pas à supporter les aigreurs au début, mais qu’il offre surtout la sagesse d’une vie sobre. Cela leur permettra de développer la persévérance nécessaire pour surmonter les difficultés temporaires qui peuvent sembler insurmontables au départ, mais qui, avec la pratique et la discipline, renforceront leurs compétences, leur sens de l’éthique, et surtout leur savoir-être.

En déambulant en ville, ou dans les rues d’Andavamamba ces derniers jours, j’ai repensé à ce livre “Bonheur d’Occasion” de Gabrielle Roy, se déroulant dans les quartiers populaires du Québec. Comme dans ses écrits, on ressent que les conséquences de ces pratiques éphémères pèsent lourd, coûtent cher. nous nous contentons de boîtes de sardines pêchées dans nos eaux, mais revendues en Euros. quand à côté certains s’empiffrent de caviar.

Quand je quitte Tana, juste après avoir franchi le dixième kilomètre, après avoir dépassé les villas style F*LTX qui font mitage sur nos collines à travers des vallées éventrées par la terre d’emprunt des remblais, je me sens transportée dans l’univers de Steinbeck. Si vous n’avez jamais lu “Les Raisins de la Colère”, prenez au moins le temps de vous plonger dans les photos d’archives des années 30, elles vous sembleront familières lorsque vous les comparez à celles du Deep South de Madagascar ou aux bourgs voisins, Ankazobe ou Ambahararata franchement c’est la même réalité.

Parce que dans certains cercles (ceux exposés par les RS), la vie semblait suivre son cours comme si nous n’avions pas été fracassés par un quadruple double cyclones de catégorie 5, une inflation galopante à deux chiffres, une pandémie mondiale traitée à base de remèdes naturels pour une maladie laissant des cicatrices sur la santé et le deuil, le prix de l’essence qui a brusquement grimpé en une seule nuit pour répondre aux exigences des réformes, sans que des mesures à moyen terme n’aident à amortir les impacts économiques. Je parcours des milliers de kilomètres par an : je le sais je le subis.

il fallait être un fervent adepte du Culte du Déni pour ignorer la pauvreté, le désespoir, les vies brisées par les pertes d’emploi, la santé qui se détériore en chacun, les amitiés ébranlées par les frustrations, les vêtements raccommodés la veille de la rentrée, les inscriptions à négocier, les retards de paiement qui s’accumulent, les impayés, les humiliations, ces recouvrements qui se voient répondre par une nonchalance exaspérante sur le ton du “on paiera quand on le voudra tsisy bedy” : rien de plus qu’une immense fatigue qui mine notre certitude d’avoir tout donné malgré tout.

malgré tout nous nous rassemblions en cohésion (ce mot m’exaspère tellement), applaudissant les Lamako sous les feux pour célébrer les “héros” faméliques des temps modernes, juste pour échapper quelques heures à la morosité quotidienne, pour raviver une santé mentale à l’agonie.

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