#syncretism 

#architecture

#urbanplanning 

#heritage 

À Madagascar, les contributions des Austronésiens s’étendent bien au-delà de la langue et des croyances, influençant également l’architecture et l’aménagement spatial, en lien avec leur vision cosmogonique. L’opportunité d’élaborer une théorie sur la morphologie urbaine, en utilisant tous les outils à ma disposition, était trop séduisante pour être ignorée. Après de longues heures, semaines et mois passés à étudier d’épais volumes, j’ai remarqué un manque flagrant d’images et d’analyses spatiales dans la littérature. Ce n’est pas que les esquisses existantes manquent de qualité ou de précision, bien au contraire. Cependant, je me trouvais incapable de visualiser ou de me projeter dans des lieux comme Irodo au 10ème siècle ou Mahilaka vers le 12ème siècle. L’intelligence artificielle offre un avantage notable en matière de gain de temps.

J’ai donc lancé le /prompt. 

Le 1er résultat, mazavawazy, a généré une image stéréotypée, reflétant des préjugés et des conceptions erronées sur nos civilisations du Sud. Cela me rappelle cette vidéo fade sur la fin du règne de Ranavalona III. Travailler avec l’IA nécessite non seulement un dialogue intelligent, mais aussi une maîtrise des techniques et formulations spécifiques dans le domaine concerné, ici l’architecture et l’urbanisme, ainsi qu’une connaissance approfondie des subtilités culturelles et techniques. Nous avons dû adopter une approche basée sur la projection et la comparaison. Lors de la deuxième tentative, j’ai demandé à l’IA de décrire l’arrivée des marchands Swahili dans la baie de Mahilaka. J’ai rencontré des difficultés avec les fortifications, car l’IA produisait systématiquement une sorte de Stupa anachronique au milieu de la plage, malgré ma mention des mangroves. Cependant, explorer l’histoire architecturale de Madagascar relève souvent plus de la mythologie que de la réalité vue la carence flagrante de contenus. ça démontre aussi des limites de l’IA. Ces visuels vont bien entendu être repris par la meilleure équipe de designers et de graphistes du monde  maintenant très experte en patrimoine de chez TRANO Architecture. Toutefois, comme pour le projet sur les maisons norvégiennes du Grand Sud, je prévois de conserver la majorité des résultats et des découvertes pour mon improbable doctorat. 

/prompt : a panoramical view of the fortified coastal city no river with mangroves of Mahilaka or Irodo with wooden architecture with this trano kotona sloping roof type and rectangular base in north Madagascar in the 12th century before arrival of Swahili shipmen

Cependant, je ne vous laisserai pas sans suite. Ces fascinantes histoires dans l’Histoire continueront à se dérouler. Je vous partage maintenant la suite du #thread #syncretism intitulé “Avy any an-dafin’ny riaka” (venus de l’au-delà des mers) l’après Srivijaya : Part I du XIè au XIIIè siècle (dont le Part II étant déjà rédigée et sera publiée très prochainement!)

on se lance

Il est évident que, bien que les Austronésiens aient disparu de nos mers dès le XIè siècle, leurs descendants à Madagascar  n’aient pas abandonné leur héritage de maîtrise des océans. C’est un aspect que je mettrai en avant dans mes prochaines publications dédié aux #Princes https://purplecorner.com/?s=Princes :

“Ibn al-Mujawir reports in 1233 CE99 that the people of Madagascar, in a naval expedition with great numbers of men, captured Aden after a period when the city had been abandoned to fishermen following the decline of the Pharaohs’ empire (meaning, perhaps, the Roman empire?). He also says that the Madagascans took possession of the peninsula and established themselves on the mountains that dominate the port. Here they constructed durable buildings using stone and cement obtained from the valleys. These still existed when he wrote. However, the Madagascans were later driven out by a revolt of a group of Arabs, called the Barabar, who had come to live among them. The Barabar settled in the valleys and constructed mat huts. Then they abandoned the place, which remained uninhabited until the immigration of Persians. Now, there is nobody left who has knowledge of the maritime activities of the Madagascans or the sort of life they led.”

Au 13ème siècle, les Chroniques de Kilwa Kisiwani https://en.wikipedia.org/wiki/Kilwa_Chronicle ,  relatées par l’explorateur et érudit marocain Ibn Battuta, décrivent les dynamiques culturelles de l’une des plus grandes cités de l’époque. Ces écrits nous informent sur la société qui a bâti et habité cette impressionnante cité maritime https://en.wikipedia.org/wiki/Kilwa_Kisiwani , et les vestiges encore visibles aujourd’hui peuvent servir de repères pour comprendre l’architecture et l’aménagement des cités du Nord de Madagascar, fortement influencées par les Swahili. On remarque également que l’organisation urbaine de ces sites reflétait une société fortement ségrégationniste, où le statut social – noble, homme libre ou esclave – influençait aussi l’espace dans laquelle l’individu évoluait dans la société. Bien que la majorité des découvertes archéologiques se concentrent sur les sépultures, des classes sociales supérieures, les vestiges d’objets domestiques offrent un aperçu précieux sur la vie quotidienne de ces civilisations. 

Et pour vous mettre un peu en contexte sur l’importance de cette période et de ces sites, je vous invite à voyager au Nord de Madagascar, en citant l’excellent ouvrage de Chantale Radimilahy pour nous donner un peu de motivation à nous investir un peu plus l’expérimentation sur ce site précis: 

“It is possible that Mahilaka could have been Ankoala, the centre of the powerful kingdom of Itongomaro. Many people were attracted to the kingdom because of its prosperity, which explains the name Itongomaro: “Tonga maro ny olona’, lit. ‘many people came to him’. The real location of this famed kingdom is still unknown, although specialists agree that it was situated near Ampasindava Bay. According to the oral traditions that I collected in 1991 from Bedoany, a female informant, about 70 years old, the centre of the kingdom was situated in the Amorontsangana region, some 20 km south of Mahilaka. Written sources tend to confirm the oral tradition. Luis Mariano, the Portuguese Jesuit who visited the northwestern coast early in the 17th century, located this site (Tinguimaro) at 13952′ in Ampasindava Bay (Kammerer 1950, p. 109; also Grandidier &Grandidier 1905 in COACM [Collection des Ouvrages Anciens concernant Madagascar] ,3 p. 641-86).
(…) it will be an important task in future research to understand how urban communities such as Mahilaka impacted upon the environment and how the people responded to and contributed to the different changes”
– Mahilaka: An Archaeological Investigation of an Early Town in Northwestern Madagascar (Studies in African Archaeology, 15) Chantal Radimilahy

Ses épiques travaux se sont intégrés dans le programme “Urban Origins in Eastern Africa” https://www.arkeologi.uu.se/Research/Publications/Development_of_Urbanism/ conçu par Paul Sinclair et ses collègues de l’Université d’Upsallaen en collaboration avec des archéologues de Somalie, du Kenya, de Tanzanie, du Mozambique, du Zimbabwe, du Botswana, des Comores et de Madagascar qui vise à partager des compétences et des équipements dans le but de se documenter et expliquer le développement d’informations sociales et économiques complexes dans le sud-ouest de l’océan Indien et en Afrique de l’Est. et pourquoi pas tout juste suivre la trajectoire des archéologues Henry T Wright et Chantal Radimilahy  qui ont publié leurs recherches sur Mahilaka, Mamoko, Amporova, tous dans la région de la Baie d’Ampasindava dans The Evolution of Settlement Systems on the Bay of Ampasindava and Nosy Be en 2005? 

Un peu plus loin, un peu plus tard, on pourrait aussi refaire le même exercice du côté de Irodo qui est plus ancien que Mahilaka https://lexpress.mg/18/02/2020/les-premieres-decouvertes-archeologiques-a-madagascar/ ou de Vohémar dont le cimetière exploré par les archéologues ont pu identifié un peuple mystérieux, les Rasikajy :

“Vérin (1986) proposed that the Rasikajy civilization was the result of biological and cultural intermingling between Islamized groups arriving at the island and local people already present in northeast Madagascar. The position of the dead in the tombs at the cemetery of Vohemar has been used to suggest that the civilization had muslim roots and the presence of imported pottery to indicate engagement in the Indian Ocean maritime trade (Dewar & Wright 1993).”
– The Rasikajy civilization in northeast Madagascar: a pre-European Chinese community? Guido Schreurs, Sandra J.T.M. Evers, Chantal Radimilahy and Jean-Aimé Rakotoarisoa

Les recherches menées sur les îles Comores, Zanzibar et d’autres sites régionaux, dont Pemba sur la côte Est africaine assiégée au Xè siècle par les Waq-Waq de Śrīwijaya, ont permis de comprendre les processus de colonisation austronésienne à travers des fouilles archéologiques et l’étude de diverses graines et plantes apportées lors des traversées, comme le montre cet article : Ancient crops provide first archaeological signature of the westward Austronesian expansion https://www.pnas.org/doi/full/10.1073/pnas.1522714113 

/prompt : a daily life scene of a austronesian mixed bantou middle class family of 4 with the mother who is more indonesian working on a loom and kids fetching water and father looking like african in front of a trano kotona sloping roof type and rectangular base wooden house looking like a big common Kalimantan Ruman Adat ) in Mahilaka in 1180 in Madagascar in a village nearby mangroves near the sea

Cette approche pourrait-elle s’appliquer également à l’architecture? 

Avec l’emploi limité, voire minimaliste, de structures en pierre, il semble plausible que les constructions étaient principalement en bois, et potentiellement même démontables – une hypothèse que j’aimerais explorer académiquement. Nous n’avons malheureusement pas de traces d’édifices aussi impressionants que sur la côte africaine du côté de Madagascar.

Par contre je suppose aussi que la cosmogonie jouerait un rôle clé dans l’aménagement et la disposition des espaces. Un travail comparatif de ce genre de principes, incluant des références archéologiques sur des sites issus de vagues successives de peuplement depuis les Vazimba aux Bantous aux nouvelles tribus, a été timidement entrepris par plusieurs chercheurs durant la colonisation française. Parmi eux, Adrien Mille a souligné l’importance de se pencher sur le patrimoine de l’Afrique Australe et de l’Indonésie collinaire, tandis que Vincent Huyghues-Belrose, spécialiste de l’espace royal malgache, et Raymond Decary, qui s’est concentré sur l’habitat, ont également contribué. Plus récemment, Didier Nativel s’est penché sur une typologie spécifique bien tardive dans notre chronologie, les trano gasy. 

On attend avec impatience une mise à jour de l’ouvrage monumental et collectif “La cité des mille: Antananarivo : histoire, architecture, urbanisme”, contribué par Rafolo Andrianaivoarivony​. Ce recueil de textes de divers auteurs, édité en 1998 par Cite Madagascar, inclut des contributions de nombreux acteurs de la Faculté des Lettres et des Sciences de l’Université d’Antananarivo ainsi que des articles d’architectes et d’érudits de la question patrimoniale​​. Toutefois, ces travaux n’ont que peu, voire pas du tout, abordé les établissements de l’ère Srivijaya et de la période suivante, marquée par l’arrivée de tribus islamisées et de populations Swahilis, période durant laquelle les proto-Malgaches se sont nettement orientés vers le syncrétisme que nous connaissons aujourd’hui. Ce nouvel opus pourrait aussi embrasser la richesse de la diversité architecturale et urbaine de Madagascar dans son ensemble. 

Malgré tout l’Empire Śrīwijaya (ou Shih-li-fo-shih), empire bouddhiste thalassocratique, après son déclin provoqué par l’invasion navale de l’Empire Chola au 12ème siècle, dans la péninsule Malayo-Indonésienne continue de me fasciner https://purplecorner.com/histoire-de-madagascar-le-destin-de-la-civilisation-laissee-par-sriwijaya. L’exploration de son Histoire (totalement disparue), notamment à travers les récentes découvertes de navires naufragés chargés de trésors près de Palembang, sa capitale mythique qui était également une cité lacustre, pourrait révéler de précieuses informations sur son histoire et son influence dans la région. Ces recherches pourraient offrir un nouvel éclairage sur les interactions culturelles, commerciales et politiques dans l’Asie du Sud-Est médiévale, ainsi que sur les réseaux de commerce maritimes qui ont connecté cette région avec d’autres parties du monde ancien. Les découvertes archéologiques, telles que les épaves de navires, peuvent fournir des informations inestimables non seulement sur l’Empire Śrīwijaya lui-même, mais aussi sur les cultures et civilisations avec lesquelles il a interagi :

“Kingsley a noté qu’à son apogée, Srivijaya contrôlait les artères de la Route maritime de la soie, un marché colossal dans lequel s’échangeaient des marchandises locales, chinoises et arabes : « Alors que le monde méditerranéen occidental entrait dans l’âge des ténèbres au huitième siècle, l’un des les plus grands royaumes du monde ont fait irruption sur la carte de l’Asie du Sud-Est. Pendant plus de 300 ans, les dirigeants de Srivijaya maîtrisèrent les routes commerciales entre le Moyen-Orient et la Chine impériale. Srivijaya est devenu le carrefour international des meilleurs produits de l’époque. Ses dirigeants ont accumulé des richesses légendaires.” 
– Have Sumatran fishing crews found the fabled Island of Gold?https://www.theguardian.com/world/2021/oct/22/have-sumatran-fishing-crews-found-the-fabled-island-of-gold

Ancient and early modern Palembang on Sumatra was largely built in the water and then sank. Photograph: Tropenmuseum, Collectie Stichting Nationaal Museum van Wereldculturen

J’ai choisi délibérément de nommer ce post “Avy any an-dafin’ny riaka” en référence à l’expression “Avy any an-dafy”, qui désigne généralement un étranger, à l’origine comme originaire des régions arabes ou indo-malaises. Avec le temps, cette perception s’est transformée, associant davantage le terme “Vazaha” aux Européens, et curieusement, je ne constate pas cette appellation utilisée pour les Africains. Un aspect historique moins exploré est qu’avant l’arrivée des premiers Portugais ou Lazaristes, qui ont marqué leur présence sur le sol malgache au nom de leur souverain, les Vazaha étaient principalement de confession musulmane, surtout après la période de l’Empire Śrīwijaya. 

Il est souvent observé que nous avons une meilleure connaissance des dates importantes de l’histoire occidentale que celles de nos propres civilisations. La compréhension des premières vagues de peuplement à Madagascar, influencées par la Route Maritime de la Soie, reste largement inexplorée, et nous nous appuyons principalement sur les écrits de géographes et navigateurs arabes pour retrouver les indices historiques. Cette période de l’histoire est captivante, car elle se déroule en même temps que la construction de l’Alhambra en 1238, ce chef-d’œuvre de l’Andalousie érigé au sommet de l’ère musulmane en Europe. 

Pour Madagascar, c’était également une époque d’enrichissement culturel, marquée par l’arrivée de pèlerins de l’Hégire, y compris ceux en provenance de régions comme Sumatra, et peut-être même du Kalimantan/ Bornéo (d’où sont originaires les proto-malgaches). Ces pèlerins arrivaient à bord de navires marchands à une époque où l’Océan Indien était largement sous le contrôle de navigateurs islamisés, comme les Swahili. Nous explorerons également comment Madagascar est devenue un havre pour les survivants de naufrages, les familles fuyant la persécution dans leurs royaumes d’origine et venus apporter Les Lumières sur l’île.

to be continued…

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